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  • Photo du rédacteurSarah HAJIB

Annie Guo, ou l’art de braver les tempêtes

Alors que la Chine ferme ses portes après la découverte du Coronavirus, à Paris, Annie Guo, entrepreneuse et fondatrice de Silkpay, une solution de paiement pour touristes chinois en Europe, ne se doute pas encore de l'impact qu'aura ce nouveau virus sur sa startup. Annie raconte son expérience en tant que cheffe d’entreprise dans le tourisme chinois durant la crise sanitaire et comment elle s’en est sortie.


Annie Guo, fondatrice de Silkpay

Silkpay, une solution au coeur du tourisme chinois


Sur le papier, le scénario ne peut être que catastrophique pour Silkpay.

La jeune startup, fondée en 2016, possède toutes les cartes pour se faire emporter par la vague Covid. Annie Guo, explique que la naissance de Silkpay se base sur un frein rencontré par bon nombre de touristes, notamment ceux provenant de son pays d’origine, la Chine. Depuis quelques années, les Chinois utilisent pour unique moyen de paiement, leur téléphone. C’est une pratique très ancrée. Le problème est que les marchands européens ne sont pas équipés pour recevoir des transactions chinoises (Alipay, Union Pay et Wechat Pay) provenant d’un système bancaire différent de ceux que nous utilisons en Europe (Master Card ou Visa…).


La problématique est donc double pour ces touristes qui se retrouvent dans l’impossibilité d’utiliser leur moyen de paiement habituel. Contraints de payer uniquement par espèce, avec un panier moyen de 1500 euros, ces derniers sont devenus, au fil des années, la proie facile des pickpockets. Silkpay est donc une solution digitale permettant aux marchés européens de recevoir les transactions chinoises en proposant un moyen de paiement adapté aux habitudes d’achat des touristes chinois, grâce à un système de QR code et de reconnaissance faciale ultra sécurisés et avec un haut plafond.


“Un sentiment de fin du monde qui pèse : tous les projets tombent à l’eau”


Photo prise par Annie de son bureau, juste avant le confinement.

Je me souviens avoir pris cette photo à l’aube du confinement. ”, déclare Annie, “J'étais la dernière à fermer les locaux. C’était mon bureau au sein d’un espace de coworking parisien, normalement bondé de monde. D’habitude, nous étions serrés, il y avait du flux dans tous les sens et du bruit partout. Et en quelques jours, plus rien. Je ne le savais pas encore, mais c’est la dernière fois que je passais le pas de cette porte. Finalement, mon équipe et moi-même ne sommes jamais revenus.


Une photo qui fait mouche, symbolisant le début d’une nouvelle ère, à laquelle personne n’était préparé.

Cette période de crise a commencé fin 2020 et a continué, bien après les confinements, le temps que le tourisme revienne à la normale. Pour Annie, l’absence de touristes était le premier gros choc, en particulier pour les marchands et commerces de proximité.

Cet arrêt brutal des activités et le fait de ne pas avoir de vue sur le futur laissaient planer “un sentiment de fin du monde qui pesait sur chacun à un moment où tous les projets de croissance tombaient à l’eau” déclare la cheffe d'entreprise.


Les choses ont rapidement pris une tournure catastrophique pour Silkpay qui a vu son chiffre d’affaires dégringoler et être divisé par cinq, très rapidement. À ce moment, Annie explique qu'il était inévitable de réduire les dépenses et de supprimer des postes. Chacun commençait à travailler chez soi. Petit à petit, les gens ont été confrontés à l’isolement et à la dépression. “Le télétravail, ça faisait bizarre” explique Annie.

Pour certains membres de l’équipe, les stagiaires notamment, leur lieu de vie n’était pas adapté au télétravail (chambre de bonne, mauvaise connexion internet etc…). Cette situation, c'était du jamais-vu pour tout le monde.


Le rôle d’Annie était donc d’encourager, éviter la solitude et la dépression. Elle raconte : ”Je me souviens, en particulier, des employés “sales” (vente), dont le cœur de métier n'existait plus à ce moment-là. Comment les occuper alors qu’il n’y avait plus d’activité ? C’était tellement difficile que certains sont partis de leur plein gré, ne voyant plus comment travailler avec nous. Des profils juniors, d’origine chinoise, par exemple, ne sont pas restés non plus. C’était une question de sécurité financière, la menace Covid laissait chacun dans l’incertitude.


As-tu eu peur durant cette crise ? Comment as-tu tenu le coup ?


Je ne dirais pas que j’ai eu peur, c’était plutôt de l’adrénaline. J’étais portée par l’idée de m’en sortir et absorbée par mes responsabilités. D’une part, il y avait ma famille et d'autre part, mon équipe, qui dépendait aussi de moi, d’une certaine manière. Certains employés étaient seuls, je ne pouvais ni les décevoir ni les abandonner. Je pense que si j’avais été seule, les choses auraient été différentes. J’avais le soutien, mais surtout la motivation de trouver une solution. “, explique l'entrepreneuse.

Beaucoup de concurrents n’ont pas tenu le coup face à la vague Covid. Le risque que Silkpay ait le même destin était grand.


"L'accompagnement, notamment par les investisseurs de The Moon Venture m’a permis de tenir financièrement », déclare la fondatrice. « Ensuite, le moral jouait aussi beaucoup. J’étais très occupée par mes deux filles et mon équipe. La logistique n’était pas simple, mais c’est ce qui me boostait. Le fait d’avoir cette forte responsabilité sur mes épaules me poussait à agir et à faire preuve de ténacité. »


Une ténacité qu’Annie explique aussi par une motivation bien plus profonde. “Une des raisons pour lesquelles j’ai décidé de me lancer dans l’entrepreneuriat, c’est que je voulais (me) prouver que j’étais capable de créer, que je savais faire autre chose que passer des examens.” De nature studieuse, entreprendre est une sorte d’émancipation. Elle continue et ajoute : “C’est aussi le moyen de prouver à mes filles qu’elles ont le choix, qu’elles peuvent décider de leur futur, sans dépendre d’un homme.


“Soit on s’adapte, soit on meurt.”


Ce qui a vraiment permis à l’équipe de reprendre les rênes de Silkpay tient en un mot : l’adaptation.

Annie et son équipe ont fait le pari d’utiliser le Covid, qui était au départ un frein, en une opportunité commerciale. « Avec mon équipe, nous avons fait évoluer Silkpay en proposant une nouvelle offre, s’alignant avec les nouvelles habitudes de consommation liées au Covid. Cette offre s’adapte au besoin de digitalisation des petites et moyennes entreprises.

Beaucoup de consommateurs ne souhaitent plus se déplacer à l’étranger pour acheter. Nous proposons donc aux entreprises françaises et européennes non équipées de site e-commerce ou e-shop une solution de vente en ligne adaptée aux touristes chinois, notamment. Aujourd’hui, cette nouvelle offre représente encore une grande partie de la demande. Silpkay a su évoluer en même temps que les consommateurs. Pour être honnête, il n’y avait pas le choix : c'est soit on s’adapte, soit on meurt”, affirme Annie.


Un entourage propice

“J’étais bien entourée. Ce qui a fait la différence, outre l’aspect financier, c’est le comportement de la communauté The Moon Venture. Ils étaient , certes, débordés durant cette période. Pourtant, je me suis toujours sentie écoutée et soutenue, ce qui n’est pas anodin lorsque d'autres investisseurs me reprochaient de ne pas avoir prévenu cette crise. Est-ce qu’il était vraiment possible de se préparer à un tel bouleversement ? Tout ne dépendait pas que de moi, c’était tout un système qui était à l’arrêt.


Le Covid m’ a appris à rester vigilante. Avant la crise sanitaire, nous nous projetions déjà aux Jeux olympiques de 2024. Le tourisme se portait bien, il n’y avait aucune ombre au tableau.” confie la fondatrice. Aujourd’hui encore, même si Silkpay va très bien, Annie préfère rester prudente quant aux perturbations liées aux contestations face aux Jeux olympiques de Paris, par exemple. « Tout peut aller très vite, mais j’ai confiance en mon équipe, avec qui le lien s’est indéniablement renforcé depuis que nous avons traversé cette crise, ensemble » explique t-elle.


 


・Silkpay, que nous continuons d'accompagner après deux levées de fonds pour 700 000 € au total, ambitionne de s’engager pour les causes d’impact solidaire. Une nouvelle dimension s’ouvre pour Silkpay qui souhaite contribuer aux sujets de société, au sens large, grâce au statut ESUS (Entreprise Solidaire au Statut Social).


 

Auteur: Sarah Hajib, responsable communication chez The Moon Venture

 

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